Un philosophe anglais sur le continent américain et un Huron en Europe : parcours croisés de deux émigrés dans le
ISBN : 978-2-86781-915-5
Nombre de pages : 12
Format : 16 x 24
Date de sortie : 2013/12
Géographiquement, les déplacements de Cleveland (Cleveland, 1731-1739) et de l’Ingénu (L’Ingénu, 1767) se croisent : le premier quitte l’Angleterre, puis la France pour gagner le continent américain tandis que le Huron, après avoir laissé sa terre natale, passe par l’Angleterre et découvre la Bretagne.
Géographiquement, les déplacements de Cleveland (Cleveland, 1731-1739) et de l’Ingénu (L’Ingénu, 1767) se croisent : le premier quitte l’Angleterre, puis la France pour gagner le continent américain tandis que le Huron, après avoir laissé sa terre natale, passe par l’Angleterre et découvre la Bretagne. En société, leur conduite s’oppose tout à fait : le personnage de Prévost s’avère incapable de faire vivre un groupe autour de lui, à la différence du héros de Voltaire, liant, aimable, créant des liens partout où il se trouve. Ces attitudes contrastées témoignent de l’influence qu’a eu le philosophe anglais sur les lecteurs de son temps. Sur un mode subtilement parodique, Voltaire semble en effet avoir voulu compenser les lacunes de Cleveland : personnage « sauvage », le Huron se montrera infiniment plus civil que son malheureux prédécesseur, condamné à la solitude et aux déceptions, aux échecs et aux trahisons. Dans la diégèse, spontanément, le « philosophe ignorant » fait d’ailleurs remarquer à quel point la « civilité » et la « politesse » font défaut aux Européens : elles se refusent à ceux qui, vaniteux, méconnaissent les mérites d’autrui. Avant l’Ingénu, le Huron de Lahontan ou la Péruvienne de Madame de Graffigny ont aussi dénoncé les travers qui menacent l’équilibre d’une société dite civile ou civilisée.
An English philosopher in America, a Huron in europe : crossed paths in French narratives of the eighteenth century
Geographically, Cleveland’s travels (Cleveland, 1731-1739) and Ingénu’s travels (L’Ingénu, 1767) intersect : the former left England, then France, to arrive in America, while the Huron, after leaving his native land, goes through England and discovers Brittany. In society, they behave in opposite ways: Prevost’s character is unable to live within a group, unlike Voltaire’s hero, whose amiability enables him to make friends everywhere. Those contrasting attitudes reflect the influence of the Philosophe anglais on contemporary readers. On a subtle parodic mode Voltaire seems to have compensated for Cleveland’s shortcomings: the “wild” Huron shows much more civility than his unfortunate predecessor, who is condemned to loneliness, disappointments, failures and betrayals. In the diegesis the “ignorant philosopher” spontaneously notices to what extent civility and politeness have become scarce among Europeans because they refuse to recognize other people’s merits. Before Voltaire’s L’Ingenu, Lahontan and Graffigny, through the characters of a Huron and a Peruvian respectively, had also denounced the negative developments threatening the balance of a so-called civil or civilized society.