L’histoire des tout débuts du christianisme pose à l’enquêteur de faits historiquement assurés des obstacles considérables. Les trous noirs y abondent et les ambiguïtés de sens engagent souvent sur de fausses pistes. Les textes de référence informative n’ont pas pour objectif premier l’objectivité historique. Leur transformation par les Églises chrétiennes en livres sacrés ne correspond pas non plus à leur objectif initial, interdisant ou gênant toute interrogation à leur sujet. Leur but, notamment dans les premiers documents écrits, était de montrer que l’enseignement de Jésus et sa vie étaient en conformité avec le contenu des livres saints du judaïsme, et que les innovations n’étaient pas des rejets, mais des adaptations inspirées par des manières plus intelligentes de compréhension de la Loi divine.
Trois questions sont abordées. La première concerne des fragments méconnus ou discutés de la vie de Jésus, tels qu’ils sont rapportés par les Évangiles et interprétés par la tradition. On peut y apporter quelques éclaircissements au vu de la comparaison des textes et de ce qu’on peut connaître de la vie des Juifs en son temps. La deuxième porte sur l’origine et les objectifs du texte connu sous le nom d’« Apocalypse de saint Jean », texte énigmatique qui a eu du mal à être intégré aux textes canoniques du christianisme. On peut en comprendre les raisons et en revoir le contenu en fonction d’hypothèses nouvelles. La troisième entraîne une révision de l’histoire des persécutions des chrétiens, au cours des quatre premiers siècles de l’Empire romain païen, où la théologie appliquée à l’histoire et l’inspiration poétique ont détourné moins de la réalité historique que du sens donné par une tradition à la fois victimaire et triomphaliste.
Il s’agit là de questions – présentées comme questions, et non comme réponses définitives – qui n’affectent en rien les choix religieux ou idéologiques des lecteurs. Elles importent à tous ceux qui éprouvent un intérêt pour la recherche d’un sens crédible, à défaut de vérité absolue, des faits d’histoire et pour l’influence (pas forcément maléfique) qu’exerce sur eux l’activité de l’imaginaire.