La réforme de la justice, et spécialement celle de la carte judiciaire, appelle une réflexion sur le prix qui lui a été attaché à travers les siècles. Ce prix peut être financièrement évalué, mais il doit être aussi intellectuellement et moralement envisagé. En effet, la justice témoigne du niveau de civilisation d’une société à un moment donné. Reflet des normes et des sanctions applicables, elle ne saurait pourtant se réduire à ces aspects juridiques. L’institution judiciaire elle-même, ainsi que son fonctionnement, résultent d’un choix politique accepté par la population. C’est dire que le prix de la justice constitue un révélateur de nos choix de société, perceptibles aujourd’hui comme hier. Du Moyen Âge à nos jours se dessinent des interrogations récurrentes : quelle rémunération des professionnels du droit pour quel accès à la justice ? Comment évaluer l’avant, puis l’après-décision judiciaire ? Le prix de la justice n’a-t-il pas des incidences sur le système juridictionnel en son entier ? Aborder ces différentes questions revient en définitive à s’intéresser aux questions de notre temps, et les mots de Voltaire rencontrent encore une résonance en la matière : « Les lois ne peuvent que se ressentir de la faiblesse des hommes qui les ont faites. Elles sont variables comme eux. » (Le prix de la justice et de l’humanité, 1777).