Traiter de l’archaïsme aujourd’hui, ce n’est pas, comme on pourrait le croire rapidement, souscrire à un courant de pensée nostalgique, ou participer à une forme irréfléchie de « devoir de mémoire », mais précisément revenir sur d’apparentes évidences et sortir de dichotomies simplistes, qui voudraient par exemple que l’archaïsme soit « le contraire » de la néologie, sous prétexte que ce qui est archaïque est ancien. Il s'agit donc, par un questionnement aussi bien lexicographique que terminologique, de revenir d'abord sur ce qui relève du préjugé. C'est l'occasion, avec des linguistes, des stylisticiens et des spécialistes de littérature, de constater combien l'archaïsme relève de l'idée que l'on se fait du temps, plus que de la datation des faits eux-mêmes : que le passé soit l'âge d'or, ou une époque révolue et obscure ; que le présent soit le triste moment de la décadence ou l'heureux moment d'une forme d'accomplissement, riche encore de virtualités infinies, et le fait archaïque lui-même s'en trouve transformé. Plus qu’un élément factuel, l’archaïsme est alors le lieu même de la cristallisation de valeurs, permettant de revenir sur la question du rapport au passé, au classicisme, ou à la modernité.